Correspondance particulière du Figaro :
Londres, 4 juin.
C’était fête artistique hier soir à Londres ; trois premières d’un seul coup : A la Gaîté, Arrah na Pogue, la pièce populaire de Boucicault, qu’on n’avait pas jouée à Londres depuis longtemps, depuis l’époque où Dumaine en donnait à Paris la traduction française de Jean la Poste, il y a cinq ans environ : – à l’Alhambra, la première du Roi Carotte, adapté aux us et coutumes anglais, c’est-à-dire pas de pièces, à peine les répliques parlées nécessaires aux machinistes, et la soirée entière consacrée au spectacle des yeux ; des décors, du paillon, des femmes demi-nues, des gigues anglaises, des ballets français, des trucs…, et des accidents. La représentation a fini ce matin à une heure et demie, heure exceptionnelle à Londres, où tout [1] les spectacles doivent être terminés à onze heures et demi au plus tard.
La féerie n’a pas très bien marché ; on sentait qu’elle n’avait pas été assez répétée ; il est arrivée des choses fâcheuses ; indépendamment des changements à vue qui ont râté, plusieurs hommes et femmes sont tombées dans les dessous et se sont plus ou moins grièvement blessée. Mais ici, cela n’est rien et dans deux jours le Roi Carotte de Londres marchera comme son confrère de Paris vers sa 150e night.
(…)
Gustave Lafargue.
