Hervé est installé à Asnières.
Dimanche, on pouvait le rencontrer errant sur la berge, vêtu d’une vareuse blanche et coiffé d’un chapeau de canotier.
Il venait, depuis quelques heures seulement, de quitter les rives hospitalières de la Tamise, après une saison fructueusement remplie.
En fouillant bien au fond de ses poches, on eût pu trouver la commande d’une grande féerie pour Covent Garden, féerie dont le titre pourrait bien ne pas être :
LA REINE NAVET.
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Puisque madame Peschard a obtenu un si grand et si légitime succès dans la Timbale d’argent, il est peut-être intéressant de rappeler dans quelles conditions elle fut engagée aux Bouffes.
On allait mettre le Roi Carotte en répétition, quand madame Peschard vint directement trouver Offenbach chez lui. Là, après lui avoir rappelé qu’elle avait chanté avec succès la Chanson de Fortunio à Marseille et lui avoir confirmé par une courte, mais excellente audition, l’opinion qu’il avait pu se former de son talent, elle dit au maître :
– Faites de moi ce que vous voudrez !
Offenbach songea aussitôt à lui confier le rôle de Rosée-du-Soir dans la pièce de Sardou, et fit part de son projet à M. Boulet, lui annonçant qu’il se chargeait de conclure l’engagement.
Mais M. Boulet n’entendit pas de cette oreille-là. Il chercha l’occasion de manifester son habileté directoriale. En se mêlant de l’affaire, il la gâta. Il écrivit directement à l’artiste, qui demeurait chez un de ses parents, propriétaire d’un hôtel meublé dans les environs de la Gaîté, et lui fit des propositions infimes. Il voulait l’engager à raison de 500 fr. par mois.
Madame Peschard alla conter la chose à Offenbach, qui, pour apprendre à M. Boulet à être moins malin, la fît engager aux Bouffes.
Sans vouloir être désagréable à mademoiselle Seveste, qui joue le rôle de Rosée dans le Roi Carotte à raison de 3,000 fr. par mois, on peut dire qu’elle ne valait pas six fois mieux que l’agréable Muller de la Timbale.
Jules Prével.