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Courrier des théâtres

Le Figaro – Samedi 3 avril 1875

La matinée de mardi dernier, à la Gaîté, a bien manqué de ne pas avoir lieu par suite d’un incident que nous allons raconter

Le personnel de la figuration est composé d’ouvriers qui ne sont pas libres dans la journée. Prévenu très tard le lundi soir qu’on ne devait pas compter sur eux le lendemain, M. Emile Taigny ne parut pas ému de ce contre-temps.

– Soyez tranquille, dit-il d’un air mystérieux à Offenbach, je réponds de tout.

Mardi matin, M. Taigny s’en va place de Grève, recrute quarante maçons après leur avoir expliqué ce qu’il attend d’eux et assuré le prix de leur journée.

Mes quarante Limousins, armés de leurs auges et de leurs truelles, emboîtent le pas pour la Gaîté.

Au théâtre, voici le dialogue qui s’engage entre le maître compagnon et Taigny :

– Ousqu’il est le mur à faire ?
– Mon ami, il ne s’agit pas de mur, je vous ai dit que vous veniez pour figurer.
– Certainement, pour figurer un mur ; allons, bourgeois, montre un peu la place pour la bâtisse.
– Dis-donc, mon petit père, tu veux te moquer de nous ; les compagnons sont pas des déguisés ; nous sont [1] venus pour un mur, nous allons te faire un mur.

Vous voyez d’ici la situation : une espèce d’émeute commençait, mais avec quelques bouteilles et une indemnité de déplacement on a pu se débarrasser de ces entêtés Limousins.

Seulement l’heure marchait et toujours pas de figuration.

Après un conseil tenu par Taigny, Vizentini, Bridault, Baudu, ces messieurs se mirent à courir la ville et ramenèrent au bout d’une heure des marmitons, des commissionnaires, des garçons boulangers.

Le moins heureux de tous fut Baudu.

Il ne rapporta qu’un… croque-mort.

Gustave Lafargue.

[1SIC

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