Au lendemain des grandes batailles, après le bulletin constatant la victoire ou la défaite, après le récit officiel où l’on rend compte des mouvements stratégiques, on écoute volontiers ceux qui racontent des épisodes de lutte. (…)
On croit peut-être qu’il n’y a que les auteurs, les artistes et les directeurs qui soient émus pendant que se décide le sort de la pièce nouvelle.
C’est une erreur. A la première du Voyage dans la lune, les décorateurs étaient dans les coulisses, nerveux, anxieux, tremblants. A chaque changement à vue, ils guettaient les applaudissements et essayaient de se rendre compte de l’impression causée par leur décor.
Le chef machiniste était non moins ému que les décorateurs, et les régisseurs partageaient l’émotion du chef-machiniste.
Au moment du ballet, les danseuses elles-mêmes n’étaient pas rassurées. On ne croit pas qu’une danseuse puisse avoir le « trac ». C’est pourtant ainsi. Quand vient le tour du premier sujet – une Italienne – ce fut bien autre chose. La danseuse serra le bras du maître de ballet en murmurant :
– Restez là… contre ce portant… pour que je vous voie. Je vous en supplie, ne me quittez pas !
Puis elle fit le signe de la croix et s’élança sur la scène en fermant les yeux.
(…)
Un monsieur de l’orchestre.