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Douze heures après, j’avais une péritonite. C’est une triste chose que d’être malade à l’étranger. Je serais mort vingt fois d’ennui, sans un incident qui me sauva. Il y a huit jours j’étais au lit naturellement, lorsqu’un Savoyard quelconque se mit à jouer de l’orgue dans la cour. Dès la première mesure, je levai la tête et j’écoutai. O surprise !
ô bonheur ! c’était l’éternel Bu qui s’avance. Je rejetai vivement mes couvertures ; je me précipitai en bas du lit, et en dépit des ordonnances du docteur qui me prescrivaient le repos le plus absolu, je me livrai à des élucubrations chorégraphiques avec un talent que je ne me connaissais pas. J’exécutais un cavalier seul des plus audacieux, lorsque la porte s’ouvrit, et le garçon parut porteur d’un de ces instruments très utiles que je ne considère jamais sans attendrissement à l’étranger, tant ils me rappellent Montmartre et ses moulins à vent. De surprise mon cameriere laissa mélancoliquement choir l’instrument qui était chargé. Je me commandai un filet très peu cuit et une bouteille de vin d’Asti. J’étais guéri.
Dans le premier élan de la reconnaissance je songeai à composer un ouvrage en plusieurs volumes in-folio que je vous aurais prié d’annoncer sous ce titre alléchant quoiqu’un peu long De l’influence de J. Offenbach sur la péritonite en général et sur l’entéro-épato-péritonite en particulier. Mais je ne tardai pas à renoncer à mon projet dans la crainte de vous attirer des lettres de MM. X…, Y… et Z…, vous avertissant qu’ils travaillent ce sujet depuis 1829.
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Trois jours après Bu qui s’avance, j’assitais [1], au théâtre Victor-Emmanuel, à une représentation de l’Africana. (…)
Amédée Le Faure.