Offenbach vient d’être pris d’un accès de goutte d’une violence extrême : il a tout le côté immobilisé.
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Il ne se passe pas de jours que nous ne recevions des lettres au sujet de la première représentation du Roi Carotte. Notre Courrier serait bientôt fait si nous voulions publier la correspondance que nous devons à Sardou et Offenbach. – Aussi nous en abstenons-nous.
Nous ferons exception pour la lettre suivante, qui contient une idée originale :
Monsieur le rédacteur,
Le Figaro étant une tribune ouverte à quiconque peut y émettre une idée bonne et utile, je prends la liberté de vous prier de vouloir bien être assez bon pour livrer à la publicité du dit journal l’avis suivant :
En Amérique, et surtout aux Etats-Unis, on a pour habitude, lorsqu’une représentation extraordinaire est annoncée, et lorsque l’on prévoit, par conséquent, une grande affluence de public, de vendre à l’encan les billets pour la dite représentation.
(…) Voici donc ce que je propose :
J’admets que dans quelque jours on annonce la première représentation :
Du Roi Carotte,
De la Reine Carotte,
Du Prince Poireau,
Du Duc Navet, etc., etc.
ou autre légumes du même genre, qu’avalent avec tant de plaisir ces imbéciles de Parisiens.Immédiatement, le directeur doit annoncer que, tel jour, à tel endroit, on vendra pour les susdites représentations, tant de billets à l’encan, et cela par l’intermédiaire d’un commissaire priseur ; de cette façon, la Société des auteurs et les commanditaires de directeurs ne seront pas lésés dans leurs intérêts.
(…) Un abonné du FIGARO.
P.-S. – Au moment où je ferme cette lettre, un ami me dit qu’on vient de lui proposer une loge pour la première du Roi Carotte moyennant 600 francs.
Peste ! le beau bénéfice !
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Dernière nouvelle. – Nous apprenons avec plaisir qu’Offenbach va beaucoup mieux ; il a pu se lever ce soir.
Gustave Lafargue.