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Semaine théâtrale

Le Ménestrel – Dimanche 4 novembre 1866

THÉÂTRE-ITALIEN : Reprise d’Otello et de Don Pasquale ; Mlle Patti ; 2e début de Mlle Lagrua
THÉÂTRE DU PALAIS-ROYAL : La Vie parisienne, pièce en quatre [1] actes de M. Ludovic Halévy et M. H. Meilhac, musique de M. J. Offenbach. — NOUVELLES.

(…)

MM. Ludovic Halévy, Henri Meilhac et Offenbach ont brillamment gagné la première bataille de leur campagne de 1867, et l’on ne peut que souhaiter aux Variétés et au Châtelet d’être aussi bien servis que le PALAIS-ROYAL. La Vie parisienne, qui vient de réussir avec quelque fracas, est tout simplement ce qu’on nomme une revue de fin d’année : seulement, le livret est fait par des jeunes gens dont l’esprit et la gaieté sont à la mode du dernier jour, tandis que ce genre d’ouvrage semble ordinairement inféodé à quelques vieux faiseurs qui ne font que reproduire, d’année en année, les actualités de l’an 1820 et de l’an 1835. Quant à la musique de M. Offenbach, nous trouvons qu’elle rompt avec un bonheur insolent et charmant la vieille routine, des timbres de vaudeville, dont nous avions les oreilles rebattues dans les théâtres de genre : pour une vingtaine de jolies chansons qui se rencontrent dans la Clef du Caveau, quelle multitude infinie de banalités et de bêtises musicales ! La muse coquette et gamine d’Offenbach renvoie sans pitié à Sainte-Périne tous ces refrains d’un vénérable ennui. Elle nous a fâché quelquefois quand elle affectait, de cascader, ainsi qu’elle aime à le dire, sur des sujets que nous croyons réservés à une muse plus noble ; mais ici, en pleine actualité, elle est chez elle, et nous avons applaudi, et de bon cœur, à ses joyeusetés.

Ne me demandez rien de la pièce même ; elle est insensée à plaisir ; ou pour mieux dire il n’y en a pas : c’est une suite de scènes burlesques composées à souhait pour les comiques de ce théâtre et peut-être un peu par eux. Parmi tout cela s’intercale une musique rieuse, pimpante et délurée qui a réussi presque à tout coup. Il faut citer rapidement l’air du Brésilien et le finale du 1er acte, en gare ; au second acte le duetto du gant et de la botte ; la chanson du baron de Gondremark : « Je veux m’en fourrer jusque-là, » dite et mimée par Hyacinthe ; puis la lettre musicalement lue par Mlle Honorine ; puis la chanson du major de table d’hôte ; puis celle de la veuve du colonel... Ce second acte est le plus musical, comme aussi le plus spirituel et le plus amusant. Au troisième acte j’ai remarqué le duo du canapé, les couplets de « la Parisienne qui sort, » un brindisi à tout briser, le galop final. La perle de la partitionnette vient à la fin, c’est la chanson de la gantière... Nous ne pouvons qu’énumérer au courant du souvenir ; il y a là trois quadrilles et une douzaine de valses, polkas, mazurkas tout prêts pour le bal de l’Opéra : on va danser dessus tout l’hiver.

Mlle Zulma Bouffar est la prima-dona de cette musique endiablée ; elle chante bien, dit bien, joue bien ; la tyrolienne qu’elle gazouille en allemand est adorable. Brasseur joue une demi-douzaine de rôles et chante une douzaine de couplets. Hyacinthe n’a jamais été plus comique ; Gil-Pérez est magnifique en amiral suisse ; Priston, Lassouche, Mlle Céline Montalant, Mme Thierret, Mlles Paurelle et Massin, ont leur part de succès.

Gustave Bertrand.

[1SIC

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