La Préfecture de police (bureau des théâtres) vient de rappeler à M. Morris l’ordonnance relative aux affiches et à l’ordre dans lequel elles doivent être imprimées et posées sur les colonnes.
Voici le texte de cette ordonnance :
« Toutes les affiches annonçant le spectacle de chaque jour seront imprimées sur papier de format à 10 centimes, pourvu que la dimension de ces affiches ne dépasse pas 63 centimètres de haut sur 43 de large.
Toutefois, les Directeurs des Théâtres auront la faculté de faire une seconde affiche destinée au développement qu’ils croiront convenable de mettre sous les yeux du public.
Cette affiche facultative devra être apposée à la droite du lecteur et à la suite des affiches obligatoires, toujours en observant l’ordre établi.
Cette faculté ne dispense aucun directeur de théâtre de l’affiche du format indiqué, qui sera toujours à son rang et qui renverra le lecteur à la grande affiche. »
Depuis quelques jours, en effet, toutes les affiches de théâtres, proprement dits sont d’égale grandeur, depuis l’Opéra jusqu’aux Délassements. Les cirques, seuls et les bals continuent à étaler d’énormes placards.
Quant aux affiches annonçant des matinées ou des représentations extraordinaires, elles devront être placées à la suite des affiches obligatoires et avant celles supplémentaires. Ce n’est que par exception que l’affiche du
Bal annuel des artistes, format à 12 centimes, est placée en ce moment après l’affiche oblgatoire de l’Opéra-Comique.
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D’après, l’arrêté qu’on vient de lire, on peut voir que la grandeur et l’ordre des affiches y sont indiqués.
Or, nous avons remarqué que l’Ambigu-Comique et les Folies-Dramatiques sont placés sur les colonnes-affiches avant la Gaîté et la Renaissance.
Pourquoi cette infraction à la règle ? Pourquoi cette fantaisie de la maison Morris, que rien ne justifie ?
Il est vrai que M. Vizentini peut s’en consoler en voyant le Voyage dans la lune friser la 150e, et M. Koning, en songeant qu’il fait fortune avec la Petite Mariée.
S’il est d’usage de voir les directeurs de théâtres courir au-devant des étoiles, il est plus rare de voir les étoiles se jeter à la face des directeurs.
Une artiste italienne, la Preziosi, qui parcourt en ce moment avec une troupe d’opérette les principales villes d’Italie, où elle obtient un succès fou, désireuse de se produire à Paris, écrivait dernièrement à un ami pour le prier d’inviter un directeur de la capitale à aller la voir à Rome.
La réponse n’arrivant pas que fait la Preziosi ? Elle demande à son impresario un congé de quelques jours, et un soir, à minuit, après avoir joué la Jolie Parfumeuse à son théâtre, elle se jette seule en chemin de fer, arrive à Paris, et vient frapper à la porte des Bouffes et des Variétés à la fois.
Aux Bouffes, elle rencontre Offenbach, qui la voit, l’entend, et, séance tenante, M. Comte signe avec la voyageuse un engagement de plusieurs années. La Preziosi, satisfaite, part comme une flèche, et remonte en chemin de fer pour Rome, où elle est arrivée juste à temps pour entrer en scène.
La Preziosi est une jeune et belle blonde, douée d’une jolie voix et très bonne chanteuse ; on l’appelle en Italie « la Desclée de l’opérette » ; ses débuts auront lieu aux Bouffes-Parisiens au commencement de l’hiver prochain.
Jules Prével.