Le Phare de la Loire rapporte que, samedi soir, à Nantes, pendant le premier acte des Brigands, une forte détonation se faisait entendre au Théâtre Gràslin.
Aussitôt, la scène et les coulisses se trouvaient plongées dans l’obscurité la plus complète, et une légère panique, on le comprend facilement, s’emparait des spectateurs qui heureusement, grâce à l’entr’acté, n’étaient que peu nombreux. Mais on revint bien vite de cette épouvante momentanée.
Voici ce qui s’était passé : au second tableau du dernier acte des Brigands, le décor du fond représente un lever de soleil. Pour arriver à produire cet effet, on projette sur une lentille un jet de lumière oxhydrique.
Pour obtenir cette lumière, on avait emmagasiné, dans deux grands sacs en caoutchouc, une assez forte quantité d’oxygène, ce qui donne à la lumière une plus grande intensité. Mais, quand toutes les précautions n’ont pas été bien prises, – et l’essentiel, dans ce cas, consiste à avoir de l’hydrogène pur de tout contact avec l’air, par exemple, – au moment où l’on veut produire la flamme, une explosion a lieu, résultant du mélange détonnant. C’est ce qui est arrivé au théâtre Graslin. Dans l’entr’acte, le gazier à qui l’on avait confié la manipulation de l’appareil oxhydrique, voulut l’essayer, et, ayant approché une lumière, le sac en Caoutchouc vola en éclats. Plusieurs objets, placés à proximité de l’appareil, furent projetés au loin et brisés, et le malheureux gazier, violemment soulevé, puis terrassé par la force d’expansion du gaz, se fit, dans la région cervicale, une assez grave blessure.
Une petite artère avait été coupée, et l’hémorrhagie était très abondante. Un chirurgien-major, qui assistait à cette représentation, a fait la ligature. L’état du blessé n’inspire plus de sérieuses inquiétudes. L’obscurité dans laquelle s’est trouvé plongé tout le théâtre, après l’explosion, s’explique par l’excès de précaution prise par le gazier, qui entendant une détonation, dont il n’a pas le temps de chercher l’explication, commence par supprimer la lumière. Ce dont il faut le plus se féliciter, dans cette circonstance, c’est que l’accident se soit produit à un moment où la salle était presque vide. On ne songe qu’en tremblant aux malheurs qui auraient pu résulter d’une panique, si elle s’était produite dans une foule compacte.
François Oswald.
