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Petit courrier des théâtres

Le Figaro – Vendredi 14 août 1868

(...)

L’auteur de la musique de Robinson Cruosé donnera cet hiver un nouvel ouvrage à l’Opéra-Comique.

Le poëme, écrit par M. Hector Crémieux, est une imitation du Vert-Vert dont mademoiselle Déjazet a si merveilleusement créé le type.

A l’Opéra-Comique, ce sera M. Capoul qui jouera le rôle créé par Déjazet.

Un écho théâtral qui nous vient de loin... de la Nouvelle-Calédonie.

On joue là le genre bouffe, tout comme à Paris.

Donc, pour donner plus d’attrait et d’importance à une pochade, Vent du soir ou l’horrible festin, le directeur avait imaginé d’ajouter une figuration composée de quarante Canaques (?) – les sauvages du pays.

Ces singuliers comparses sont des indigènes soumis... qui n’ont pas encore tout à fait renoncé aux délicats festins de l’antropophagie.

Il faut, à cet égard, les surveiller de près.

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Les quarante Canaques arrivaient en scène, dévorant des cannes à sucre. A l’entrée de ces gaillards d’aspect féroce, les dents blanches et longues, les yeux allumés par la vue des bons blancs et des blanches dodues qui garnissaient la salle, un véritable malaise s’empare des spectateurs et ça jette un froid.

Dans la pièce, le cuisinier était représenté par M. Chaton, qui connaît l’idiome des Canaques, et qui avait mission de les faire manœuvrer.

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Quand, fidèle à son rôle, il feignit de vouloir accommoder en gibelotte l’acteur qui joue le prisonnier, et lui tâta le mollet, à la mode des anthropophages, pour s’assurer qu’il était bien en chair, la bouffonnerie sembla tourner au tragique les figurants dont l’instinct se réveillait, voulurent tâter aussi le sujet, et, le trouvant très mangeable, ils exprimaient déjà un contentement peu énigmatique ! Le public eut une vraie peur et les artistes du théâtre ne riaient plus.

On dut s’empresser de congédier par la suite cette dangereuse figuration et de renoncer à cet excès de couleur locale.

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C’est un marin revenant de la Nouvelle-Calédonie qui nous raconte ce curieux épisode et nous en affirme l’authenticité.

Le joli pays pour les artistes dramatiques... Ah ! le joli pays !

Jules Prével.

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