Le pauvre Grenier n’est plus : il est mort hier, à onze heures et demie du matin. Il avait 42 ans.
Grenier avait commencé dans la typographie. Qui dit typographe dit acteur-amateur. Il quitta bientôt l’imprimerie pour le Conservatoire.
Élève de Samson, il remporta un premier prix de déclamation et débuta dans l’emploi des Scapins à l’Odéon. Puis, M. Cogniard l’engagea aux Variétés, où il jouait encore, il n’y a pas longtemps, dans la dernière reprise de la Vie parisienne, le rôle de l’amiral suisse.
Après avoir débuté dans la comédie au boulevard Montmartre, il fut menacé dans son avenir par l’invasion de l’opérette. Résolument, il sacrifia au goût nouveau, et de comique se fit bouffon. Sa création de Calchas dans la Belle Hélène, montra sa souplesse d’artiste et son aptitude aux cascades ; mais dans ses excentricités voulues, il conserva l’art des nuances et celui de composer et de varier ses types selon les caractères et les situations. Il s’abandonna avec tant de zèle aux lazzis du genre burlesque, qu’un soir, il se cassa la jambe en scène.
Sardou, qui a du coup d’œil, désigna Grenier pour incarner son Rabagas. Rabagas et Boirot dans l’Homme n’est pas parfait, voilà les deux meilleurs rôles de Grenier, ceux qui le feront vivre dans le souvenir de ses contemporains. Mais il a créé aux Variétés une infinité de rôles : il est peu de pièces importantes où il n’ait eu à dessiner un personnage : le prince Paul dans la Grande duchesse, le vice-roi dans la Périchole, etc., etc…
L’enterrement de Grenier aura lieu demain samedi, à onze heures précises, en l’église Saint-Roch. On se réunira à la maison mortuaire, 7, rue de Louvois.
Jules Prével.